Ce matin, les eurodéputés doivent réclamer l’inscription dans les budgets communautaires d’un fonds d’aide alimentaire de 3,5 milliards d’euros. Mais les pays du Nord pourraient plaider pour que ce fonds soit « facultatif ».
«Le déshonneur s’abat collectivement sur les chefs d’État européens quand ceux-ci proposent de réduire de1 milliard d’euros (le montant de l’aide alimentaire européenne) et de retirer à manger à ceux qui ont faim », a lancé Younous Omarjee, député de la Gauche unitaire européenne (GUE), hier, à Strasbourg, lors du débat en séance plénière sur la création d’un Fonds européen d’aide aux plus démunis (Fead). L’élu entendait adresser « un message clair, puissant et sans ambiguïté » pour demander au Conseil européen « un budget a minima de 3,5 milliards d’euros » pour les sept prochaines années (2014-2020). Ce montant a été repris par une majorité des groupes parlementaires, de la gauche jusqu’au Parti populaire européen. Tel devrait donc être, à l’issue du vote solennel programmé ce matin, le mandat accordé à la socialiste irlandaise Emer Costello pour négocier avec le Conseil, qui ne souhaitait au départ accorder que 2,5 milliards d’euros à ce fonds.
Cette nouvelle base de négociation n’était pas gagnée d’avance, les socialistes européens s’étant d’abord contentés, lors des discussions en commission, de faire référence au « montant du précédent programme ». Or les fonds réellement consommés par le passé ont à peine atteint les 3 milliards. Sous la pression de la GUE, le texte est revenu en séance plénière et les socialistes ont finalement présenté un amendement pour exiger 3,5 milliards d’euros. « Nous palabrons péniblement (…) pour éviter que l’aide alimentaire baisse de 40 % quand le budget de l’UE ne baisse, lui, que de 3 % », a regretté le socialiste belge Marc Tarabella. Mais si les progressistes ont remporté la bataille du budget au Parlement, ils n’ont pas pour autant gagné la guerre de l’aide alimentaire.
Des eurodéputés venus d’Allemagne, des Pays-Bas, du Royaume-Uni, de Suède, du Danemark ou de la République tchèque souhaitent continuer le travail de sape entamé par leurs gouvernements contre le Fead. Nombre d’entre eux devraient voter, contre l’avis de leur groupe politique, un amendement des libéraux visant à rendre le nouveau fonds simplement facultatif. Les États qui refusent de bénéficier de l’aide alimentaire pourraient reverser ces sommes au Fonds social européen. Elles abonderaient d’autres types d’aides qui leur sont destinées, par exemple dans le domaine de l’emploi…
Chaque État pourrait ainsi déterminer nationalement l’utilisation de fonds européens. « Sans la participation obligatoire de tous les États, on ne pourrait parler de solidarité européenne, a déploré Patrick Le Hyaric, député européen (GUE) et directeur de l’Humanité. L’Europe serait à la carte dès qu’il s’agit de pauvreté alors que les plans d’austérité restent, eux, bel et bien obligatoires. »
les associations attentives
Mobilisés sur le dossier de l’aide alimentaire, les banques alimentaires, la Croix-Rouge française, les Restos du cœur et le Secours populaire ont prévu de suivre de près les débats à Strasbourg. Ils réclament « l’inscription d’un fonds doté de 3,5 milliards d’euros minimum pour la période 2014-2020 ». « Ne prenons pas de risques avec l’avenir car le sort des plus démunis en dépend », écrivent-ils dans un communiqué commun.