Déposée a suite d’une déclaration de la vice-présidente de la Commission / haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité
le suivi des élections en République démocratique du congo RSP))
Marie-Christine Vergiat, Patrick Le Hyaric, Younous Omarjee au nom du groupe GUE/NGL
Le Parlement européen,
– vu ses résolutions précédentes sur la République démocratique du Congo (RDC),
– vu l’accord de partenariat de Cotonou signé en juin 2000,
– vu la résolution de l’Assemblée parlementaire paritaire ACP-UE, du 22 novembre 2007, sur la situation en République démocratique du Congo, en particulier dans l’est du pays, et son impact sur la région,
– vu la résolution 60/1 de l’Assemblée générale des Nations unies, du 24 octobre 2005, sur les résultats du Sommet mondial de 2005, et en particulier ses paragraphes 138 à 140 sur la responsabilité de protéger les populations,
– vu la déclaration d’un porte-parole de la vice-présidente de la Commission/ haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Mme Catherine Ashton, le 3 juin 2010, sur la mort brutale de M. Floribert Chebeya Bahizire,
– vu les lignes directrices de l’Union européenne de 2004 pour la protection des défenseurs des droits de l’homme et la stratégie locale pour la mise en œuvre des lignes directrices en RDC, adoptées par les chefs de mission le 20 mars 2010,
– vu le rapport de la mission d’observation électorale de l’Union européenne (MOE-UE) pour les élections législatives et présidentielles du 28 novembre 2011 en République démocratique du Congo,
– vu l’article 110, paragraphe 2, de son règlement,
A. considérant que dans son rapport final sur les législatives de fin 2011 en RDC, publié le 29 mars 2012, la mission d’observation électorale de l’Union européenne (MOE-UE) “considère que les résultats publiés par la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) ne sont pas crédibles à la lumière des nombreuses irrégularités et fraudes constatées lors du processus électoral“;
B. considérant que le scrutin à été marqué par un niveau élevé de corruption et une mauvaise organisation du processus électoral;
C. considérant que ces élections se sont tenues dans un contexte d’insécurité à l’est et au nord de la RDC liée aux agissements criminels de groupes armés alimentés par l’exploitation illicite des ressources naturelles;
D. considérant que l’accroissement du chômage, la dégradation de la situation sociale et la paupérisation de la population est également un des facteurs déterminant de l’instabilité politique en République démocratique du Congo;
E. considérant l’insécurité lié à l’impunité des graves violations des droits de l’homme perpétrées contre la population par des éléments des mouvements rebelles, maï-maï et des FARDC et leurs alliés;
F. considérant également les nombreuses tensions politiques liées à la modification en janvier 2011 de la Loi fondamentale à moins d’un an de l’élection présidentielle pour en changer le mode de scrutin, ainsi que les tensions dues à la révision constitutionnelle, du calendrier du processus électoral 2011-2013 publié par la CEI et de la question d’un audit du fichier électoral pour son éventuelle révision (l’opposition et la société civile dénonçant l’inscription sur ce fichier de mineurs et d’étrangers);
G. considérant que les entraves aux libertés d’expression et de manifestation et notamment les violations des droits de l’homme (utilisation disproportionnée de la force; arrestations et détentions arbitraires) perpétrées par les forces de l’ordre contre des manifestants de l’opposition se sont multipliées pendant et depuis les élections;
H. considérant que les intimidations, menaces et harcèlements ce sont également multipliés contre des défenseurs des droits de l’homme;
I. considérant la formation de “milices” par les acteurs politiques de la majorité présidentielle; considérant le climat de guerre civile qui règne dans ce pays depuis des années, entraînant des massacres, des viols massifs et la généralisation, dans certaines régions, des enfants soldats, et ce malgré la présence de 17 000 hommes sur le terrain envoyés par l’ONU; considérant que ces violences ont en outre entraîné plusieurs centaines de milliers de déplacés;
J. considérant que le 23 juin 2011, la Cour militaire de Kinshasa-Gombe reconnaîssait la responsabilité civile de l’État congolais dans l’assassinat de M. Chebeya et de M. Bazana (respectivement président et membre de la “Voix des Sans voix”) par plusieurs de ses agents, et condamnait cinq des huit policiers prévenus, dont quatre à la peine capitale et un à la prison à perpétuité;
K. considérant que le 28 juin 2011, quelques jours après le verdict de la Cour, les parties civiles et le ministère public interjetaient appel pour “mal jugé”: or, depuis cette date, soit près d’un an après l’introduction du recours, la Haute cour militaire n’a toujours pas fixé de dates pour la reprise du procès en appel;
1. déplore que la tenue des élections de fin 2011 ait été marquée par une violation des droits l’homme au lieu de contribuer à un renforcement de la démocratie dans le pays; déplore que les dates des prochaines échéances (élections provinciales et locales) permettant de clore le cycle électoral en cours soient constamment reportées; déplore que les demandes de la société civile quant à la révision de la loi électorale et de la commission électorale nationale indépendante (CENI) soient ignorées;
2. demande au gouvernement de la République démocratique du Congo de promouvoir et protéger la démocratie et les droits humains conformément aux dispositions constitutionnelles et législatives congolaises et aux instruments internationaux de protection des droits humains ratifiés par la RDC; demande au parlement de la RDC de relancer ses discussions en vue de l’adoption du projet de loi sur la protection des défenseurs des droits de l’homme et du projet de loi portant création de la commission nationale des droits de l’homme;
3. demande de la même façon le respect des libertés de réunions, d’expression et de manifestation conformément aux conventions internationales de protection des droits humains et à la Constitution de la RDC (les articles 23, 25, 26);
4. souligne le fait que la participation pleine et entière de la population à la vie politique du pays ne pourra être effective que dans un contexte de reconnaissance des droits civiques, économiques et sociaux;
5. juge dans se contexte que l’instabilité politique, tout comme l’incapacité de la population à avoir accès aux ressources naturelles du pays, l’accroissement du chômage, la dégradation de la situation sociale et la paupérisation sont des obstacles à la démocratie et doivent être des priorités absolues dans la prochaine période;
6. demande à l’Union européenne la mobilisation de tous les fonds nécessaires afin de mettre en œuvre une aide médicale effective particulièrement dans la région de l’Est du pays;
7. demande par conséquent à l’Union européenne et à la communauté internationale d’accompagner la RDC dans ses efforts de consolidation de la démocratie et de la paix, d’appuyer les ONG congolaises dans la sensibilisation des électeurs et l’observation domestique des élections et de soutenir le peuple congolais dans sa volonté de démocratie et de justice sociale;
8. demande également qu’un bilan exhaustif et impartial de la mission de l’ONU (MONUC) et des missions de l’UE (EUSEC et EUPOL) en République démocratique du Congo soit effectué, en particulier sur leur incapacité à empêcher les violences et sur leur possible participation aux crimes de guerres et aux atrocités commises à l’encontre des populations du pays; demande la fin immédiate des missions militaires de l’UE;
9. condamne de nouveau les assassinats de Floribert Chebeya Bazire et de Fidèle Bazana Eladi et demande instamment aux autorités judiciaires de garantir le droit des parties civiles à un procès en appel et de fixer les dates d’audience par la Haute cour militaire sans plus tarder; demande aux autorités de RDC de faire de la lutte contre l’impunité une priorité, notamment concernant les violences sexuelles perpétrées par les forces armées; de relancer le processus de démobilisation totale des enfants impliqués dans les FARDC; de coopérer avec la CPI, notamment à travers l’exécution du mandat d’arrêt contre M. Bosco Ntaganda, qui, malgré son inculpation, officie actuellement en qualité de général des forces armées de RDC à Goma;
10. appelle à une participation accrue des femmes dans la construction de la paix, la prévention des conflits, et la démilitarisation de la RDC, et à un soutien accru aux femmes victimes de violences sexuelles et les viols de masse;
11. encourage le parlement congolais à réexaminer la loi portant création des tribunaux mixtes spécialisés et à réexaminer le projet de loi harmonisant le droit national avec le statut de Rome;
12. demande à l’Union européenne de poursuivre, sous couvert de l’article 8 de la Convention de Cotonou, un dialogue régulier et suivi qui soit ouvert à la société civile;
13. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, à la haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, aux gouvernements et aux parlements des États membres, au gouvernement de la République démocratique du Congo, aux institutions de l’Union africaine, au Secrétaire général des Nations unies, à l’Assemblée générale de l’organisation des Nations unies, aux coprésidents de l’Assemblée parlementaire ACP-UE et au président du parlement panafricain (PAP).