Prévue de longue date et bien avant les dernières élections italiennes, la Commission du Développement Régional (REGI) a honoré la mission qu’elle avait prévue de conduire en Calabre. Comme toutes les missions de notre Commission, je l’ai conduite en qualité de President, accompagné de députés de tous groupes politiques.
L’Italie est, avec la Pologne, le pays le plus grand bénéficiaire des fonds de la cohésion. Ainsi que le principal pays bénéficiaire des fonds de relance décidée pendant la pandémie. Les inégalités territoriales en Italie restent très marquées, et symbolisent les fractures entre le Nord et le Sud.
L’Union européenne ne peut plus les ignorer, au risque de créer des chocs politiques chaque fois plus durs. Il est aussi essentiel pour notre Commission d’évaluer la mise en oeuvre des fonds ainsi que regarder de plus près comment continuer à avancer pour réduire ces fractures territoriales.
Depuis notre décision de nous rendre en Italie, le gouvernement a changé en Italie, avec l’arrivée au pouvoir de Giorgia Meloni et la désignation comme Ministre des Affaires européennes de Raffaelle Fitto, qui était membre de notre Commission REGI. Si le gouvernement a changé, l’Italie reste l’Italie, le Sud de l’Europe reste le Sud de l’Europe et l’Italie demeure un grand pays bénéficiaire de la politique de cohésion, avec de nombreuses problématiques de capacités administratives, en particulier dans le sud de l’Italie, que nous souhaitions aussi mesurer.
En compagnie du President de région de Calabre et des autorités italiennes, notre délégation s’est rendue au port de Gioia Tauro pour la visite des installations portuaires très largement financées, depuis sa construction, sur les fonds du Fonds européen de développement régional (FEDER) et aujourd’hui en attente de nouveaux financements pour la continuation de sa modernisaton.
Le port de Gioia Tauro est, en terme de trafic et de déchargement de containers, le plus grand port d’Italie. Véritable hub maritime il est central pour le commerce en Méditerranée, de même pour les bateaux empruntant le canal de suez et le détroit de Gibraltar le point le plus direct dans la route vers l’Asie et la Chine.
Mais plus encore il joue un rôle pivot pour toute l’Italie tant pour l’importation que l’exportation des marchandises ce qui a conduit d’opérer des investissements importants pour l’intermodalité.
Aujourd’hui, tout l’enjeu pour la région de Calabre est de mettre ce grand port au service du développement de la région ce qui suppose dans investissements nouveaux dans les bases arrières. Des financements sont également recherchés pour viser l’énergie et notamment en matière gazification liquide. Ces questions ont été au coeur de la reunion de travail avec l’ensemble des autorités portuaires qui se trouvent sous la responsabilité du President Agistinelli.
Nous avons évoqué des pistes concrètes de financements nouveaux à travers des instruments nouveaux et tout particulièrement concernant la partie énergie, de l’éligibilité sur REPowerEU. Ce nouvel instrument sera bientôt adopté et dégagera pour les États et les régions 300 milliards d’euros pour le financement d’investissements énergétiques notamment pour le renouvelable et le gaz.
Nos échanges n’ont pas évacué les questions liées au contrôle des débarquements, et notamment de la lutte contre le trafic de drogue, contre la mafia ainsi que de détournements avérés par le passé sur les fonds européens. Les autorités militaires et de police nous ont fait un point de situation. Enfin, avec le Président nous avons convenu d’initiatives communes pour soutenir les efforts de la Commission REGI pour relancer tous les processus politiques pour la Méditerranée au coeur de tous les échanges.
Il ne m’était pas possible d’accomplir une visite en Calabre sans que soit rendu possible dans le programme la visite du musée national pour contempler les bronzes de Riace. Merci aux autorités italiennes d’avoir organisé cette visite dans des conditions exceptionnelles, avec les commentaires instruits du plus grand expert italien de ces bronzes. Un des moments les plus forts de ce déplacement.
Les bronzes de Riace furent découvertes en 1972, dans des conditions assez fortuites, au large de Riace, en Calabre, et remontées des profondeurs de l’océan sur les lieux d’un naufrage dans l’antiquité. La datation de ces bronzes ne fait plus de doute : le cinquième siècle avant Jesus-Christ.
Conservées dans des conditions époustouflantes, mesurant près de 2 mètres et pesant 250 kilos chacune, ces statues figurent toutes deux un guerrier armé dans la nudité héroïque. Ils sont debout, au repos, en appui sur la jambe droite, bras gauche replié, tête tournée vers la droite. Leurs armes ont aujourd’hui disparu mais sont aisément restituables : un bouclier à leur bras gauche, comme l’indique le brassard qui subsiste, une lance ou une épée dans la main droite. Une bandelette retenait la chevelure de A, et un casque venait reposer sur la calotte que B porte encore. Des matériaux rapportés soulignent avec raffinement certains détails : le cuivre pour les lèvres, les mamelons et les cils, l’argent pour les dents. L’ivoire, le calcaire et la pâte de verre rehaussent encore partiellement les yeux. Et même les dents.
Le Jeune et l’Adulte provoquent des émotions extrêmement fortes, très sensuelles, car ils sont tout au top de l’idéal de l’esthétique. De la précision des dessins de la musculature, tout en harmonie, à la finesse du traitement de leur visage. De face comme de dos : ils sont sublimes !
Pour un tel contenu, le contenant devait être a la hauteur. Installés dans une salle lumineuse du palais Piacentini, qui abrite le musée archéologique de Reggio de Calabre, restauré par l’architecte de renom Paolo Desideri. Les travaux, qui ont coûté 34 millions d’euros, ont bénéficié de financements européens. Toutes les précautions ont été prises pour assurer leur conservation : structures antisismiques et climatisation parfaites.
Car les catastrophes naturelles sont une donne permanente dont il convient de tenir compte dans la définition des politiques régionales.
En Calabre, la prise en compte du risque sismique va de soi. Au Sud de l’Italie, la plaque africaine exerce une forte poussée sur la plaque eurasienne, le long d’une faille qui traverse notamment la Calabre et la Sicile, terres d’intenses activités sismiques et volcaniques.
Reste dans les mémoires en Calabre, les terribles séismes de 1783 qui ont fait près de 50 000 morts, et plus récemment le séisme de 1908 a Messine qui a fait près de 200 000 morts, ou celui du 6 avril 2009 de magnitude 6,3 survenu à l’Aquila, une ville historique du 13ème siècle, qui a fait 300 morts, plus de 1 500 blessés et plus de 50 000 sans-abri.
Au cours de notre déplacement en Calabre nous avons évoqué les surcoûts liés a la construction des bâtiments et de toutes les infrastructures pour atténuer autant que possible les impacts des tremblements de terre, visités les centres de veille sismique et opérationnels d’alerte qui fonctionnent 24h sur 24.
Nous avons évoqué les investissements européens dans les matériels d’observation dans les grands fonds marins notamment sans oublier les échanges d’informations entre États membres concernant les alertes tsunamis.
Nous avons également eu la possibilité de vivre une simulation de séisme dans 3 conditions différentes. Le simulateur de tremblement de terre reproduit exactement les oscillations produites par de vrais tremblements de terre.
La première au dernier étage d’un immeuble construit aux normes les plus élevées , la deuxième dans le même immeuble mais construit avec des normes minimales et l’an troisième, absolument effrayante dans un immeuble construit sans aucune prise en compte des normes anti sismiques. Il s’agit surtout d’immeubles construits au début du siècle dernier.
Au centre opérationnel, nous avons compris qu’entre le premier moment où apparaissent les signes d’une activité gravement anormale, la localisation d’un épicentre et la survenance dans les terres du séisme, il ne s’écoule que quelques secondes. Quelques secondes pour prendre les mesures d’information des populations et d’arrêt des activités dangereuses.
Je défends, depuis plusieurs années, la création d’un Fonds européen d’adaptation au changement climatique, qui permettrait aux régions d’Europe d’investir pour en endiguer les effets, en sécurisant par exemple un certain nombre d’infrastructures menacées par les évènements climatiques extrêmes.