Les acteurs agricoles des régions ultrapériphériques (RUP) s’inquiètent d’une possible diminution des aides du POSEI. Cette inquiétude est légitime. Bien qu’à ce stade, rien n’est décidé. Ici quelques éléments pour bien comprendre le pourquoi du comment.
En juin 2018, la Commission européenne a publié une proposition visant à modifier le règlement d’organisation commune des marchés (OCM) et d’autres règlements dont le POSEI. Immédiatement, les députés européens des RUP avaient réagi auprès de Jean Claude Juncker et de Phil Hogan, l’ancien commissaire a l’agriculture, en les saisissants par courrier, leur rappelant l’engagement qu’ils avaient pris à Cayenne lors de la conférence des RUP, de ne pas toucher au budget du POSEI.
Devant notre mobilisation, la Commission européenne s’était engagé à ce que cette baisse ne soit pas actée
Et de concert avec Eurodom nous avions organisé la contrattaque et la mobilisation jusqu’à Bruxelles. C’est ainsi que nous avions réuni les organisations agricoles professionnelles des RUP et organisé le lundi 26 juin une grande réunion au Parlement européen pour protester. Devant la levée de bouclier, la Commission européenne s’était engagée le lendemain, le mardi 27 juin, à agir auprès du Conseil européen pour que cette baisse ne soit pas actée. “Mon engagement, et celui du président Juncker sont des engagements solennels” avait alors déclaré le commissaire européen Phil Hogan, s’engageant “à ce que l’on recule sur la baisse de 3,9 %”.
Ce qu’il faut aussi comprendre sur le POSEI, c’est que la Commission propose et ensuite c’est le Conseil Européen (les Gouvernements des 27 États-Membres) avec le Parlement européen qui décident. De notre côté, au niveau du Parlement européen, nous avons tenu parole. Et le 1er Avril 2019, le Parlement européen a voté dans sa proposition une enveloppe du POSEI qui ne diminue pas et a inscrit un montant qui satisfaisait tous les acteurs. Du côté du Conseil européen, la France mais aussi l’Espagne et le Portugal se sont quant à eux engagés à agir pour convaincre les autres États membres que cette baisse est inappropriée, et remporter la bataille au sein du Conseil. Ce qu’ils ne sont pas encore parvenus à gagner.
Contrairement à ses engagements, le Commissaire européen à l’agriculture a de nouveau proposé cette baisse du budget POSEI
Il faut dire que le dossier de la réforme de la PAC (dans lequel s’est inscrit la proposition de baisse du POSEI) est épineux et qu’il a bloqué et bloque encore à tous les niveaux. Il a d’ailleurs tellement bloqué, qu’en octobre 2019, face à l’échec des négociations entre le Parlement et le Conseil sur la future PAC 2021-2027, la Commission Européenne a dû publier un règlement transitoire pour l’année 2021 afin d’assurer la continuité de la PAC jusqu’à la mise en place de la nouvelle réforme. À la surprise générale et contrairement à ses propres engagements et à ceux pris par Jean-Claude Juncker au nom de toute la Commission européenne, le Commissaire Hogan a de nouveau proposé cette baisse du budget POSEI. Le Parlement a de nouveau adopté des amendements visant à rétablir le budget du POSEI ce 28 avril 2020.
Une négociation est depuis lors engagée entre le Parlement et le Conseil européen sur ce règlement dit transitoire. Le Parlement européen en toute logique défend sa position de maintien des fonds POSEI. Nous pensions que la position du Conseil dans la négociation aurait été de satisfaire à notre demande et qu’ainsi l’accord aurait pu être scellé. Sauf qu’à ce stade les gouvernements, dont la position est exprimée par l’Allemagne qui préside l’Union Européenne, ne parviennent à s’accorder entre eux et demandent que la baisse des crédits telle qu’initialement demandée par la Commission européenne soit confirmée. Ce que le Parlement européen refuse absolument.
Face au blocage, la France doit maintenant urgemment remonter au créneau pour convaincre les autres pays
À ce stade donc, il y a blocage. Et aucune décision de prise jusqu’a la prochaine réunion de négociation. Nous pensions que la France avait fait le travail attendu auprès de ses partenaires. Manifestement elle doit maintenant urgemment remonter au créneau pour convaincre les autres pays, et faire de cette question une ligne rouge absolue et infranchissable pour la France. J’appelle le gouvernement à se mobiliser sans plus tarder. Du côté du Parlement européen nous ne cédons pas. Nous continuons à nous opposer fermement a toute diminution de l’enveloppe POSEI. Et nous sommes activement mobilisés dans des séries de rencontres et dans des échanges de courrier jusqu’au plus haut niveau.
C’est une garantie pour l’ensemble de nos agriculteurs. Pour qu’aucune mauvaise décision ne puisse être prise par surprise. Mais il faudra bien sortir de ce blocage, je l’espère par le haut. C’est ce à quoi nous travaillons. J’invite vivement les acteurs agricoles des RUP à maintenir la pression maximale sur le Gouvernement français. Cela aidera.